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Dans
leur édition du 20.2.09, les DNA rendent compte, avec
leur habituelle complaisance, d’un « événement
» local, la cavalcade des enfants, orchestrée
à Benfeld par des professionnels de l’Espace
Jeunes de cette petite ville, avec la complicité de
certains enseignants. Le titre de l’article entend synthétiser
un concept issu de la féconde imagination des animateurs
adultes : « Toujours plus de bruit ». Certes l’ambiance
doit être celle d’un carnaval. Il s’agit
bien sûr d’un temps de liesse et de défoulement
collectif. « Les enfants sont donc invités à
affoler les décibels », écrit le journaliste.
Les décibels sont des abstractions que rien n’affolera
jamais. Par contre le bruit peut affoler des oreilles humaines.
La surenchère dans le vacarme peut mettre à
mal l’ouïe des tout petits, comme d’ailleurs
celle des grands.
« La trame qu’on a choisi cette année (sic),
c’est le bruit et la musique. » L’observation
est d’une animatrice de l’Espace Jeunes. L’association
de deux notions antagonistes (la musique, qui suggère
le plaisir d’écouter, et le bruit, qui renvoie
au déplaisir d’entendre) n’est déjà
pas rassurante en soi. On ne s’étonnera donc
pas du comportement de ladite animatrice le jour J. En possession
d’un mégaphone criard, elle s’échine
à rivaliser avec une étourdissante sono ambulante.
Il faut ce qu’il faut. Il y a quand même 400 enfants
à « décibelliser ». Les petits en
prennent plein les écoutilles ! Il est vrai que beaucoup
d’entre eux ont l’habitude du boucan, puisqu’ils
mangent régulièrement à la cantine où
le brouhaha peut enfler jusqu’aux alentours de 85 dB…
Initier de très jeunes bambins au bruit, les accoutumer
à un environnement sonore dangereux, les abrutir, en
quelque sorte, en voilà une étrange pédagogie
!
Le bruit, hélas, ne favorise pas la réflexion.
Il est incompatible avec l’idéal du dialogue
et de l’échange. Il est aussi liberticide qu’un
pouvoir totalitaire. La vraie fête sait mobiliser tous
les sens, mais n’en laisse aucun imposer aux autres
sa dictature.
D.E. |